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Stratégie de la jambe de bois et stratégie d’évitement ou comment certains sportifs préservent leur estime de soi.

" La compétition est une rencontre avec l’autre, l’adversaire mais aussi le partenaire me permettant de me surpasser " disait Albert Jacquart. Mais, c’est aussi un moment de vérité où l’on doit se montrer aux autres et à soi même. Cette mise en lumière n’est pas toujours facile à accepter car quelles que soient les performances réalisées, l’individu a naturellement tendance à vouloir préserver son estime de soi.
Dans cette perspective, certains recourent à différentes stratégies parmi lesquelles, la stratégie de la jambe de bois et la stratégie d’évitement. Cette dernière a tendance à coloniser les milieux de l’entraînement, particulièrement au moment de l’adolescence.
La méconnaissance de ces phénomènes peut poser des problèmes aux entraîneurs et être à l’origine de conflits conduisant à l’arrêt de la pratique. Disposer des outils pour y faire face est en revanche une compétence supplémentaire bien utile.

La stratégie de la jambe de bois, c’est quoi ?
C’est une des stratégies d’auto-handicap utilisées dans le but de sauvegarder l’estime de soi. Les stratégies d’auto-handicap consistent à dresser des obstacles sur la voie de ses propres succès ou de son propre progrès. Ces stratégies sont le plus souvent l’expression d’un manque de confiance en soi : le sportif évalue ses risques d’échec futur et s’efforce, de manière anticipée, de construire des excuses qui pourront lui servir, le cas échéant, à justifier son échec.
La stratégie de la jambe de bois consiste pour le sportif à admettre publiquement une faiblesse (anxiété, douleur anormale, petite blessure) ou un handicap mineur (la "jambe de bois"). Le but est d’éviter de laisser paraître ou de révéler une faiblesse plus importante pour son estime personnelle, comme par exemple être incompétent.

Comment y faire face ?
Un niveau suffisamment élevé de confiance en soi est le plus souvent nécessaire pour réaliser de bonnes performances. Il s’agit donc de faire en sorte que le sportif reprenne confiance en lui :

  • en lui réapprenant à attribuer sa réussite et ses échecs à ses efforts.
  • en lui faisant prendre conscience des progrès qu’il a réalisés.
  • en l’aidant à avoir une représentation positive de ses compétences dans différents domaines.

L’idée est d’inscrire mentalement en lui une conception "progressiste" de l’habileté motrice. Ceci est à l’opposé de l’idée selon laquelle « certains sont doués ou très doués pour devenir des champions et d’autres pas… et qu’on ne peut rien y faire  » ; très courante même chez les sportifs compétiteurs. En pratique, cela consiste à démontrer dans les faits, c’est-à-dire par la pratique que l’on peut progresser.
Les solutions ne fonctionnent pas de façon systématique et le sportif peut aussi développer d’autres stratégies d’auto-handicap.

La stratégie d’évitement
C’est un comportement de défense visant à ne pas se trouver confronté à une situation redoutée. Ainsi, si diverses stratégies ne suffisent pas ou plus pour maintenir une estime de soi suffisante, le sportif peut être amené à recourir à une stratégie d’évitement. On trouve parmi celles-ci la stratégie d’absence ou de fuite… à l’entraînement ou en compétition.
Pour agir, il est important de bien comprendre son mécanisme : « Ce qui va motiver [les sportifs] c’est d’augmenter l’estime de soi. Dans le cas où l’estime de soi se trouve mise en cause, ils vont chercher à se protéger, et pour se protéger adopter des conduites d’évitement. [e.g. : Marie José Pérec aux JO de Sydney]La question qui se pose est de savoir comment cela fonctionne pour ceux qui ont une basse estime de soi […]. La réalité montre que ce sont des gens qui ne savent pas exactement ce qu’ils sont, qui peuvent changer très rapidement de façon d’être d’une situation à l’autre et qui sont en dessous des autres mais pas tout en bas dans l’échelle de l’estime de soi. Ces gens là mettent en doute leurs compétences et vont avoir recours à des comportements d’évitement  » Famose (2002a). Autrement dit, si le sportif considère qu’il est trop difficile d’atteindre l’objectif, il estimera alors ses chances de réussite trop réduites, ce qui pourra le conduire à refuser de s’engager. C’est la peur de l’échec qui motive ce type de stratégie.
Ce qui va être déterminant par rapport à l’effort consenti et à la persévérance face aux difficultés est là aussi le climat motivationnel (Sarrazin & col., 2006). Il s’agit concrètement de conduire le sportif à s’entraîner et à participer aux compétitions dans un but de maîtrise et non pas exclusivement de performance.

Conclusion
En sport, « …chaque compétition est une menace pour l’estime de soi. Une simple défaite suffit parfois à briser une confiance en soi, qui va se répercuter sur l’estime que le sportif à de soi et peut générer l’envie d’abandon de la carrière  » Bacquaert (2008).
La stratégie de la jambe de bois est l’une des différentes stratégies d’auto-handicap expliquée par Famose (2001), parmi lesquelles :

  • la diminution de l’effort,
  • la procrastination (remettre systématiquement au lendemain des actions),
  • le choix de la difficulté de la tâche,
  • le refus de l’aide,
  • l’absence à l’entraînement ou l’évitement d’une situation menaçante pour l’estime de soi.

Concernant la dernière stratégie évoquée : «  Toujours dans le but de sauvegarder son estime de soi, la fuite avant une compétition importante (quelles que soient les raisons invoquées pour la justifier), l’absence non justifiée […] à l’entraînement peuvent généralement être considérées comme étant des types d’excuses permettant […] au sportif de se soustraire à une situation d’évaluation risquée de sa compétence » Famose (2002b).
Les stratégies d’auto-handicap sont des préparations à un échec possible et non une analyse suite à un échec avéré. Le problème est celui de la motivation et plus encore de l’attitude mentale. A nouveau la désacralisation de la compétition et de son verdict, les formules par équipe, sont, lorsque cela est possible, des pistes à explorer afin de décentrer les problèmes pour mieux les affronter par la suite.

Références :

  • Bacquaert, P. (2008). Encore une erreur d’arbitrage ! Où comment maintenir une estime de soi positive… IRBMS. En ligne.
  • Famose, J.-P. (2001). La motivation en éducation physique et en sport. Armand Collin éditeur.
  • Famose, J.-P. (2002a). Apprentissage moteur et motivation. Conférence. Formation continue des enseignants d’EPS. Poitiers. En ligne.
  • Famose, J.-P. (2002b). Comment et dans quelle condition peut-on apprendre ? En ligne.
  • Sarrazin, P., Tessier, D. & Trouillod, D. (2006). Climat motivationnel instauré par l’enseignant et implication des élèves en classe : l’état des recherches. Revue française de pédagogie. 157 : 147-177.

Voir en ligne : Stratégie de la jambe de bois et stratégie d’évitement ou comment certains sportifs préservent leur estime de soi.

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