Accueil > Enseignements > Education Physique et Sportive > Coacher ou comment accompagner vers la réussite : Quelques modèles (...)

Coacher ou comment accompagner vers la réussite : Quelques modèles d’accompagnement au changement.

Le coaching est à la mode depuis la fin du vingtième siècle : Coaching mental, coaching de carrière, coaching de relooking, coaching sportif… « A l’heure du "one to one" (moi et mon psy, moi et mon coiffeur…) […] le XXIe siècle vit sous l’emprise des coachs […] Aujourd’hui, tout le monde coache tout le monde » Benaïm (2003).
Mais, le terme de coaching est souvent galvaudé. Cet article présente quelques éléments pour y voir plus clair.

Qu’est-ce que le coaching ?
Le terme coach vient d’un mot Hongrois qui désignait au 16ème siècle une "grande voiture à chevaux" fabriquée à Kocs : Une coche en français.
Actuellement, le terme peut être entendu au sens large d’accompagnement au changement vers la réussite.
Il s’agit plus précisément d’accompagner une personne ou un groupe vers la réussite de son projet impliquant le développement de ses ressources stratégiques et techniques, tactiques et décisionnelles, affectives et émotionnelles, athlétiques (Bouthier, 1988) impliquées dans l’action, de leurs processus de mobilisation, d’organisation et de contrôle (régulation).
De ce point de vue, l’activité du coach peut être assimilée à du tutorat. Alors que les coachs experts auto-déclarés sont légion, tutorer dans un domaine d’activité implique une sérieuse connaissance de ce domaine et de ces activités ainsi que la maîtrise de modèles d’accompagnement au changement.

Coaching et charlatanisme
Si des professionnels compétents existent, le coaching a aussi été «  instrumentalisé par toutes sortes de charlatans et même des mouvances sectaires » Masson & col. (2018).
Par principe, en coaching, la relation entre le coach et le coaché doit être égalitaire, nombreux sont les pseudo-coachs qui se positionnent en mentor : Conseillers en tout mais spécialistes en rien, ceux-ci sont faciles à débusquer par leur positionnement en "guide autoritaire" visant à masquer leur ignorance du domaine de pratique des personnes qu’ils prennent en charge.
Ainsi et parce que toute forme d’éducation vise l’autonomie, la question à se poser alors est :
Du coach ou du coaché, lequel des deux est-il dépendant de l’autre ?
Fuyez les coachs qui vous relancent sans cesse alors que vous avez enfin retrouvé votre autonomie.
Quoi qu’il en soit, le coach ne peut pas faire l’économie de quatre incontournables :

  1. Une éthique conforme au code de déontologie (Fornalik, 2016), impliquant un devoir de confidentialité.
  2. Une démarche individualisée.
  3. Une expertise du domaine de pratique du coaché.
  4. La maîtrise de modèles d’accompagnement au changement.

En effet, il est inconcevable de guider une personne dans son projet en tout ignorance des contraintes, théories, méthodes, techniques, modèles de ce domaine. Par ailleurs, si certains coachs misent essentiellement sur leur empathie, les particularités individuelles ne peuvent être éludées, impliquant une vraie formation à la prise en charge à défaut d’être psychologue de formation.

Pertinence de l’approche clinique
Contrairement à la psychothérapie, le coaching est généralement fondé sur une demande clairement exprimée pour une aide opérationnelle de courte durée.
Il ne nous semble pas abusif mais au contraire pertinent de considérer que l’approche clinique d’inspiration psychanalytique (Blanchard-Laville, 1999), a toute sa pertinence en coaching pour plusieurs raisons :

  1. Elle est fondée sur « une position méthodologique […] la question du sujet (histoire personnelle, expérience vécue, création continue de soi…) ou plus exactement celle […] de ses rapports complexes avec le fonctionnement social  » Revault d’Allone (1989).
  2. Elle «  s’intéresse d’abord à des cas individuels, qui ne sont jamais rigoureusement comparables […] ses interprétations se réfèrent à un ensemble synchronique et diachronique de conduites » Gréco (1999).
  3. Elle permet d’« envisager la conduite dans sa perspective propre, relever aussi fidèlement que possible les manières d’être et de réagir d’un être humain concret et complet aux prises avec une situation […] déceler les conflits qui la motivent et les démarches qui tendent à résoudre ces conflits… » Lagache (1949).

Ainsi, en coaching, c’est toute la prise en compte du sujet, dans ce qu’il a de singulier, qui ne peut pas être occulté.

Quelques modèles d’accompagnement au changement
Le modèle, ci-dessous, de perception du changement proposé par Sylvand (2017), éclaire sur le décalage entre le changement nécessaire et celui imaginé par le sujet. Ce décalage permet aussi d’expliquer que « les personnes ne résistent pas au changement, mais à la peur du changement ».

Modèle de Sylvand (2017)

« La perception de la situation initiale A peut être sous-évaluée et pensée plus critique qu’elle ne l’est objectivement. Le point de départ du changement sera perçu comme A’, de même que la situation cible B pourra être surestimée […] comme B’, si bien que le changement A — B est vécu comme A’ — B’ avec une impression d’effort ne correspondant pas à celui planifié. » Sylvand (2017).
Ceci incite les coachs à prendre en compte les personnes en tant que personnes avec leur singularité dont leurs appréhensions. Coacher impliquerait alors d’écouter, de rassurer, d’encourager d’aider à interpréter et plus généralement de modifier «  la façon de voir les choses  » c’est-à-dire les représentations mentales.

Le modèle de Prochaska & DiClemente (1982) comprend les étapes suivantes :

  1. Pré-intention ou pré-contemplation : Le sujet ne pense pas avoir de problèmes et n’envisage pas de changer de comportement.
  2. Intention ou contemplation : Le sujet envisage un changement de comportement mais hésite à renoncer aux bénéfices de la situation actuelle, comparant le pour et le contre d’un changement avec ceux de son comportement actuel.
  3. Préparation : Le sujet se sent prêt à démarrer la phase d’action dans un futur proche ; il détermine des décisions et commence à les mettre en place dans le temps.
  4. Action : Le sujet est activement engagé dans le changement. Les difficultés qu’il rencontre nécessitent soutien et encouragement.
  5. Maintien : C’est une phase de consolidation face aux tentations d’abandon.
  6. Rechute : Elle est possible et fait partie du processus normal de changement.
Modèle de Prochaska & DiClemente (1982)

Si ce modèle apporte un éclairage sur les processus inhérents au sujet en situation de changement, il ne guide en rien le coach dans son intervention.
Par ailleurs, Watzlawick, Fish, & Weakland, J. (2000), de l’Ecole de Palo Alto, s’appuient sur la théorie des groupes et la théorie des types logiques pour conclure que lorsque toute tentative de changement aboutit au même résultat, c’est que la solution est à construire en dehors du cadre. Coacher serait accompagner le sujet à envisager une solution en dehors du cadre habituel, à défaut de solution dans le cadre ordinaire.
Professeur à la Harvard Business School, John P. Kotter, a mis au point une démarche de changement collectif en 8 étapes.

Modèle de changement en huit étapes selon Kotter
  • L’étape 1 ("Créer l’urgence") consiste à trouver les arguments pour créer chez le sujet un sentiment d’urgence, en s’appuyant si nécessaire sur des preuves tangibles.
  • L’étape 2 ("Former une coalition puissante") consiste à établir un véritable leadership, pour constituer une équipe soudée et influente.
  • L’étape 3 ("Créer une vision de l’état à atteindre"), consiste à apporter des éléments tangibles qui justifie et rende réaliste le projet de transformation dans toutes ses dimensions.
  • L’étape 4 ("Communiquer la vision") ne se limite pas à une simple présentation, mais en un discours redondant et de plus en plus précis au cours du développement du projet
  • L’étape 5 ("Inciter à l’action et abaisser les obstacles"), vise à impliquer les collaborateurs à l’action, impliquant une responsabilisation de chacun au bénéfice de la réussite de tous et dans une perspective durable.
  • L’étape 6 ("Générer des victoires à court terme"), consiste à jalonner la réussite sur plusieurs échelles de temps (tâches, étapes, phases), maintenant l’implication et le dynamisme des participants.
  • L’étape 7 ("Consolider les succès pour plus de changement"), consiste, entre autres, à la généralisation des process mis au point.
  • L’étape 8 ("Ancrer les nouvelles approches dans la culture d’entreprise") consiste à faire de l’état final atteint un élément de la culture donc de l’identité du groupe.

Conclusion
Parce que le coaching est devenu en quelques années une activité très lucrative, certains se sont improvisés experts sans réelle formation à la prise en charge et au suivi, n’hésitant pas à accompagner des personnes dans des domaines d’activité dont ils ignorent tout.
A l’inverse, des outils d’accompagnement au changement existent impliquant de prendre en compte les personnes dans leur singularité, ce que permet l’approche clinique.

Références :

  • Benaïm, L. (2003). Coachmania. Psychologie.
  • Bouthier, D. (1988). Les conditions cognitives de la formation d’actions sportives collectives. Thèse de Psychologie, Ecole Pratique des Hautes Etudes - Université Paris V.
  • Fornalik, P. (2016). Comment choisir un coach professionnel ? Ekilium.
  • Fornalik, P. (2017). De l’importance de la demande en coaching – Le métier de coach. Ekilium.
  • Gréco, P. (1999). Psychologie. In Encyclopedia Universalis. Mérignac.
  • Lagache, D. (1949). L’unité de la psychologie. Psychologie expérimentale et psychologie clinique. Paris PUF.
  • Blanchard-Laville, C. (1999). L’approche clinique d’inspiration psychanalytique : enjeux théoriques et méthodologiques. In Revue Française de Pédagogie : 127, 9-22.
  • Masson, R., Mathias, N., Soulier, M. & Cosme, S. (2018). Pour vivre heureux, vivons coachés. Reportage. France inter.
  • Prochaska, J.-O. & DiClemente, C.-C. (1982). Transtheoretical therapy : Toward a more integrative model of change. Psychotherapy : Theory, Research and Practice. 19(3) : 276-288.
  • Revault d’Allones, C. (1989). Psychologie clinique et démarche clinique. In C. Revault d’Allones et al., La démarche clinique en Sciences Humaines. Paris : Dunod.
  • Sylvand, B. (2017). Manager le changement. Manager, Go !
  • Watzlawick, P., Fish, R., & Weakland, J. (2000). Changement, paradoxe et psychothérapie. Edition Seuil.

Voir en ligne : Coacher ou comment accompagner vers la réussite : Quelques modèles d’accompagnement au changement.

Ajouter un commentaire

Forum sur abonnement

Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.

Connexions’inscriremot de passe oublié ?

Suivre les commentaires : RSS 2.0 | Atom