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Savoir se détendre pour revenir plus performant

Quel que soit le domaine d’activité considéré, la performance passe souvent par la qualité et la quantité du travail que l’on réalise. Pourtant, l’erreur serait de croire qu’il existe une relation linéaire entre la charge de travail et les performances. Bien que cela puisse sembler paradoxal, l’efficacité du travail passe aussi par la qualité des phases et des formes de détente que l’on s’octroie. Il s’agit de considérer ici la détente au sens large du terme.
Condition d’une récupération efficace, dont elle se distingue par sa nature et sa temporalité, se détendre consisterait entre autres à rompre avec le dispositif de stimulations, permettant alors de reconstruire des équilibres physiologiques, psychologiques voire sociaux, vitaux pour la santé et le bien-être, mais aussi pour être plus performant.

Que signifie "se détendre" ?
Il s’agit d’interrompre son activité voire de quitter le lieu de pratique, sur différentes échelles de temps allant de la répétition à l’entraînement. L’idée est celle d’en partir mentalement et si nécessaire physiquement pour y revenir dans de meilleures dispositions, favorables à de nouvelles transformations (apprentissages) et/ou performance. Se détendre viserait ainsi à se relaxer.
Pour cela, se détendre impliquerait de créer les conditions pour :

  1. être moins focalisé du point de vue attentionnel,
  2. être moins réactif physiquement,
  3. être moins impliqué socialement.

En pratique, il s’agirait de s’extraire mentalement, physiquement, socialement des facteurs de stress ou de tension et des enjeux de la pratique.

Se détendre sur différentes échelles de temps
A l’entraînement, entre les répétitions, les séries et les blocs, se détendre vise à restaurer un relâchement musculaire tout en restant concentré. Pour cela, de nombreux sportifs experts pratiquent une respiration profonde durant quelques secondes parfois en tournant dos au dispositif de pratique.
Entre les exercices, se détendre favoriserait, tel un rituel, de passer mentalement à une nouvelle situation, rompant avec la précédente, permettant de se concentrer sur d’autres consignes.
Se détendre pour libérer et ainsi rendre disponible son attention est également utilisé entre deux parties de séances, par exemple entre une partie spécifique, technique ou tactique et une partie plus globale permettant d’expérimenter dans la pratique ce qui a été exercé de manière analytique. Là aussi, les sportifs ont des rituels consistant à se réorganiser à la fois mentalement et physiquement mais aussi matériellement. C’est aussi à cette occasion qu’ils se réhydratent ou s’alimentent.
Entre les séances, se détendre consiste à retrouver sa vie sociale. Entre les cycles, il s’agit d’assurer la transition vers un autre mode prépondérant de stimulations psychologies et de sollicitations de l’appareil locomoteur.
A l’issue d’une phase de préparation et à l’approche d’une compétition, se détendre s’inscrit dans le cadre de l’affûtage.
Entre les saisons sportives, si se détendre est essentiel, il faudra faire attention à ne pas verser dans les coupures longues comme en cyclisme impliquant une reprise totale s’opposant à un continuum d’entraînement (Vaast, 2003).

Se détendre mentalement
Siège de l’activité psychique et comme le signalait déjà Setchenov dès 1860, le système nerveux central préside toute l’activité de l’organisme. Aussi, c’est la dimension nerveuse et psychologique de la détente qu’il faut envisager prioritairement et comme élément inductif de l’état de tension ou au contraire de relâchement physique.
La condition sine qua non de la détente est le « lâcher prise » ou comment accepter de s’extraire voire de se détacher mentalement de ce qui nous anime, telle que la recherche du progrès et de la performance à réaliser chez le sportif. Concrètement, ceci implique :

  • de ne plus «  vouloir contrôler tout ce qui nous entoure […] Une attitude intérieure d’ouverture à la vie et aux autres » (Senk & Farcet, 2017),
  • - de vivre dans l’"ici et maintenant".

Pour autant, «  Le lâcher-prise, dans l’immédiateté, est totalement compatible avec l’action dans la durée. Le lâcher-prise n’est pas se résigner mais être conscient de ses limites » (Ibid). Or, accepter ses limites, c’est accepter d’avoir de temps en temps besoin de prendre du recul par rapport aux activités qui exigent une implication totale, telle que se préparer pour une compétition à enjeux.
A l’entraînement, en compétition mais aussi au quotidien, cela peut consister à «  Se centrer sur sa respiration […] imaginer qu’à chaque expiration on repousse la colère, la tristesse, les sentiments négatifs ; et qu’à chaque inspiration on inhale la confiance, la joie, la gratitude » (Ibid). Le rythme respiratoire de la cohérence cardiaque peut y aider : inspiration durant 6 secondes, expiration durant 6 secondes, suivie de 2 secondes d’apnée, pendant 3 minutes plusieurs fois par jour.

Se détendre physiquement
Cela peut aller de l’inactivité physique temporaire à la pratique d’une autre activité. Il est ainsi possible pour se détendre, de :

  • ne rien faire en tant qu’acteur (dormir, écouter de la musique, lire, voir un film, méditer, se faire masser).
  • faire une autre activité sans rapport avec le sport, telle que cuisiner, jardiner, bricoler, se balader, faire du shoping, visiter…
  • pratiquer une autre activité physique mais sans enjeux compétitifs pour être stimulé autrement : Yoga, BudoKon, Taï Chi, Pilates (Chabrillac, 2008), stretching...
  • s’intéresser à son sport d’un autre point de vue (voir des matchs, soutenir un partenaire d’entraînement ou son équipe, lire des revues ou des livres techniques, scientifiques).

Se détendre socialement
Comme évoqué plus haut, il s’agit là aussi de s’extraire temporairement d’un contexte d’enjeux donc des groupes de personnes que l’on fréquente dans le but essentiel de progresser et notamment en club sportif.
C’est aussi l’occasion de se rapprocher de son entourage et de ses amis pour retrouver une vie sociale moins exclusive (sorties ou activités en famille et/ou entre amis).

Les pseudo-détentes
Alors que se détendre consiste à se déconnecter des sources de stimulation, se réfugier dans les objets connectés (ordinateur, tablette, smartphone, montre connectée, jeux vidéo) qui nous maintiennent constamment en alerte par les notifications et autres informations qu’ils délivrent n’est certainement pas la solution contrairement à un "retour à la nature" (balade en forêt, jardinage).
Par exemple et notamment chez les enfants : «  l’addiction aux écrans […] certains scientifiques parlent même de drogue dure-, auxquels adultes, ados et, plus grave, jeunes enfants, sont devenus en quelques années totalement dépendants.  » Baudin (2018)
Et, selon l’Académie des sciences (citée par Folléa & Pichon, 2016) :

  • avant 2 ans : «  les écrans non interactifs […] peuvent avoir des effets négatifs : prise de poids, retard de langage, déficit d’attention, risque d’adopter une attitude passive face au monde  ». A ce sujet avant 6 ans, «  la possession d’une console ou d’une tablette personnelle présente plus de risques que d’avantages »
  • chez les adolescents, « un usage trop exclusif d’Internet peut créer une pensée zapping […] appauvrissant la mémoire, la capacité de synthèse personnelle et d’intériorité  ».

Le pédopsychiatre Boris Cyrulnik est formel :

  • Concernant les petits, « Pas d’écran du tout avant 3 ans […] les écrans sont mauvais aussi bien pour le développement cérébral que pour l’empathie de l’enfant  »
  • Concernant les adolescents, «  S’il y a trop d’écran, il n’apprend pas les interactions, il a un trouble de l’empathie donc il est soumis à ses pulsions. Comme on le voit aujourd’hui chez beaucoup d’adolescents, garçons et filles, qui ne contrôlent pas leurs émotions et qui passent à l’acte ou bien contre eux-mêmes ou bien contre les autres  ».

Conclusion
En plus de revenir à l’activité dans un état plus propice aux apprentissages et aux performances, se détendre permet de réduire le niveau de stress (Chabrillac, 2008) et d’attention, à se recentrer voire à entretenir la passion au bénéfice de la continuité de la pratique.
Pour autant, être capable de se détendre n’est pas donné à tout le monde, d’autant que les rythmes de la vie en société visent à nous rendre de plus en plus concurrentiels, n’autorisant que peu de relâchement. L’une des solutions et de planifier sa journée avec rigueur, incluant des moments de détente incontournables où l’on cherche à s’imposer une rupture mentale avec les contextes : « Quand je suis au boulot, je ne pense qu’au boulot, quand je suis en famille, je pense à la famille et non pas au boulot, quand je fais du sport, je pense à mon sport et non pas à mes soucis de boulot ou de famille… », une discipline de l’esprit qui s’acquiert sur le long terme qui permet à la fois de se protéger et d’être plus efficace dans chacun des registres d’activité.
Plus encore qu’une question de bien-être, se détendre pourrait à terme être vital, notamment en réduisant le risques de burn-out ou de surentraînement.

Références :

  • Baudin, J. (2018). Envoyé spécial alerte sur le danger des écrans sur les enfants. En ligne.
  • Chabrillac, O. (2008). On se relaxe. Psychologies. En ligne.
  • Folléa, L. & Pichon, A. (2016). Trop d’écrans : les risques pour les enfants. Psychologies. En ligne.
  • Senk, P. & Farcet, G. (2017). Le lâcher prise, c’est accepter ses limites. Psychologies. En ligne.
  • Setchenov, I.-M. (1860). Materialy dlya buduschey fiziologii alkogolnogo opyanenia. Doctoral dissertation. Medico-Surgical Academy, St. Petersburg.
  • Vaast, C. (2003). Les fondamentaux du cyclisme. Compétition, cyclosport, cyclotourisme.

Voir en ligne : Savoir se détendre pour revenir plus performant

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